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03/12/2014

Le travail du dimanche : pas d'accord !

 

Il est des débats qui reviennent régulièrement sur le devant de la scène politique et sociale : ainsi, le travail du dimanche, nouvelle marotte des libéraux qui peuplent le gouvernement et squattent les aéroports. L'assaut a été redonné il y a quelques semaines par l'actuel ministre de l'économie, ce M. Macron qui nous vante les bienfaits de la mondialisation et oublie de se rendre au salon du Made in France, sans doute trop « nationaliste » pour lui...

 

L'argument des partisans de l'ouverture des magasins le dimanche est toujours le même : donner à ceux qui le veulent la possibilité de travailler ce jour-là pour que les consommateurs puissent consommer, la consommation étant un nouveau droit (devoir, même, si l'on en croit les grands manitous de la croissance...) de l'homme moderne. Ainsi, M. Macron et ses amis, en dignes héritiers d'un Mai 68 qui a surtout libéré le capitalisme des traditions qui gênaient encore son expansion, veulent-ils « Tout, et immédiatement ! » : « Jouir sans entraves », slogan qui se voulait contestataire est devenu le meilleur argument des parangons des libéraux et des consommationnistes de toutes les obédiences ! Sans l'entrave des traditions héritées d'un passé (pas si) lointain où le temps n'était pas encore condamné à n'être compté qu'en argent ; sans l'entrave d'une longue histoire sociale qui, au XIXe siècle déjà, n'a été que le dur combat des catholiques sociaux et des syndicalistes pour retrouver quelques droits que la Révolution et les lois socialicides de 1791 avaient supprimés, déjà au nom de « la liberté du travail » ; sans l'entrave d'une vie familiale qui se joue à plusieurs et non dans la seule solitude de l'individu enfermé dans son ego... Toutes ces entraves que ne supportent plus les Macron et autres forcenés de l'individualisme consumériste : « la consommation est libre, la consommation vous rend libre », pourraient-ils clamer en cœur, la main sur le portefeuille et les yeux sur le CAC 40 !

 

Ont-ils déjà gagné ? Dans son édition du mardi 2 décembre, le quotidien La Croix rapportait que, en 2011, 29 % des salariés ont travaillé le dimanche (contre 20 % en 1990), dont près de la moitié de manière habituelle : une proportion qui me semble augmenter régulièrement, au regard des magasins qui, à Versailles et au Chesnay, se mettent à leur tour à ouvrir leurs portes régulièrement et définitivement, en particulier ceux des grandes enseignes alimentaires qui prennent de plus en plus de clients aux commerçants du marché matinal... Ainsi, le travail dominical, hier exceptionnel et réservé à quelques activités, principalement alimentaires et artisanales (qui s'arrêtaient d'ailleurs à l'heure du déjeuner), et aux domaines de la sécurité et de la santé, devient-il une arme de destruction massive qui élimine les « petits » et « indépendants » au profit des enseignes et des multinationales de l'alimentaire et du luxe... Ce qui devrait rester une exception, en devenant une habitude et, demain, une règle, transforme nos sociétés en vaste espace-temps consumériste dans lequel toutes les limites, familiales, sociales, voire religieuses, sont balayées devant la puissance de l'Argent et de ses épigones. Ce n'est pas la société que je souhaite pour mon pays, ni pour ceux que j'aime...

 

Le dimanche doit rester un jour « différent » des autres : s'il devenait égal aux autres, l'Argent aurait encore gagné du terrain sur nos vies, et la sinistre formule du plus sinistre des libéraux, Benjamin Franklin (dont il faudra bien, un jour, instruire le procès), ce fameux « Time is money » (« Le temps c'est de l'argent ») que je déteste au plus haut point, de toutes les fibres de mon être, verrait son aura maléfique grandir encore...

 

En 1814, le roi Louis XVIII « sacralisait » le dimanche, et proscrivait toute activité commerciale et financière ce jour : à bien y regarder, ce n'était pas qu'une mesure « religieuse » comme l'ont dénoncée les bourgeois de l'époque, furieux de voir remis en cause ce qui leur était acquis depuis la Révolution libérale de 1791, cette fameuse « liberté du travail » qui autorisait toutes les dérives et enchaînait les travailleurs aux détenteurs du Capital. Non, c'était aussi et d'abord, si l'on sait lire entre les lignes d'un roi plus habile et agile que sa corpulence pouvait laisser supposer, une mesure de justice sociale à l'égard des ouvriers et des artisans du pays.

 

Sacraliser socialement le dimanche ? Pourquoi pas, après tout, pour désacraliser un peu l'Argent et l'idéologie franklinienne...

 

 

 

03/02/2009

Lire Albert de Mun.

Je suis très en retard dans mon travail de rédaction et je n’ai pas encore répondu aux objections de Romain, ce que je vais essayer de faire d’ici la fin de la semaine : cela sera d’ailleurs une occasion de préciser ce que j’entends par « monarchie active » et ce que je propose pour la représentation politique et l’organisation des pouvoirs en France.

En fait, je me suis consacré ces jours derniers, au-delà des multiples corrections de copies (ça ne finira donc jamais ?), à la lecture des discours politiques et parlementaires d’Albert de Mun, député catholique et légitimiste (rallié tardivement et à contrecœur à la IIIe République, après 1890), discours passionnants d’un homme avant tout attaché à améliorer la condition sociale des plus faibles et en particulier des ouvriers au temps des révolutions industrielles du XIXe siècle, révolutions dominées par les idées individualistes et capitalistes, si peu chrétiennes… J’ai dévoré le premier tome de ses discours (sur les six que je possède) en quelques soirées et avec une sorte de fièvre qui me brûlait encore bien des heures après avoir refermé le livre : je découvrais des textes qui, au-delà de l’éloignement des temps anciens qui ont entendu ces paroles fortes d’un homme de bonne volonté (des années 187O jusqu’à celle de sa mort, en 1914), apparaissent d’une actualité assez surprenante, ce qui n’est pas forcément rassurant, d’ailleurs, car cela indique que la situation des ouvriers restent encore fort précaire, quand elle n’est pas purement et simplement effacée par notre époque qui prête plus attention à la couleur de peau qu’à l’usure des êtres par le travail…

Le débat sur le statut du dimanche, par exemple, était déjà fort vif dans les années 1880-1900, et les royalistes les plus marqués et fervents (Albert de Mun était alors de ceux-là) se battaient pour un repos dominical que les républicains de gouvernement considéraient comme un archaïsme dangereux pour les affaires et les consciences… Il est frappant de constater comment les libéraux de l’époque se recrutaient plus dans les rangs des républicains que dans ceux des monarchistes, en particulier légitimistes, et que leurs arguments sont à peu près les mêmes d’un siècle à l’autre, arguant toujours de la « liberté du travail » qui n’est, en fait, que celle des patrons et des financiers, et non celle des ouvriers.  

Albert de Mun, au moins pour ses discours « sociaux », mériterait d’être réédité, relu et médité : au-delà des archives parlementaires et de son ralliement à la fois compréhensible et peu crédible à la République qu’il espère ainsi influencer dans un sens à la fois plus chrétien et plus social (illusions dont on connaît le résultat…), il appartient aussi (et malgré tout) à la mémoire du royalisme français.

J’attaque le deuxième tome demain soir…